La plus grande ferme verticale de France

Usbek & Rica a visité la plus grande ferme verticale de France. Plaçons dès le début cet article dans la fiche «complexité» plutôt que sous «solution durable». En effet, si dans l’article en question on garde surtout pour la fin la question de la consommation d’énergie très élevée de ce modèle d’agriculture, c’est en fait une des raisons de notre billet; bel exemple de la complexité de trouver de nouvelles solutions aux défis climatique. L’intérêt du modèle, discutable considérant la demande énergétique, devra être équilibré avec ses bénéfices. Comme quoi très peu de solutions sont simples et sont plutôt formées d’une série de compromis.

«La société Jungle fait pousser basilic, moutarde et autres plantes aromatiques dans des chambres de plusieurs mètres de hauteur, grâce à un ingénieux système d’agriculture verticale». C’est, semble-t’il, la plus grande de France, et l’une des plus grandes d’Europe.

[U]n concept simple mais très en vogue, décliné aux quatre coins du monde depuis sa théorisation en 1999 par le microbiologiste Dickson Despommier : celui d’agriculture verticale. Soit le fait de cultiver des produits alimentaires en grande quantité grâce à des structures placées les unes au-dessus des autres, et non directement depuis la terre. À partir d’un savant mélange de substrats, de vermiculites et, en l’occurrence, de lumière artificielle.

Les micro-pousses commencent dans de petits pots, dans le noir d’une pièce humide. Puis rayons UV par des lampes LED, arrosage précis, photos répétées afin de vérifier l’absence de pathogènes, logiciel dédié, on ne lésine pas sur la techno pour aider la pousse et multiplier les récoltes annuelles.

Les conditions – température, humidité, circulation de l’air – sont alors ajustées à la virgule près, notamment grâce à des sondes de conductivité électrique chargées de mesurer les nutriments absorbés. Et si Jungle ne peut prétendre à l’étiquette bio (le label européen étant réservé à la production en sol), aucun produit phytosanitaire – ni pesticide, ni herbicide, ni fongicide – n’est utilisé.

Alors que pour certain ce type de solution s’adressent au milieu urbain à petite échelle, les entrepreneurs parlent ici d’agriculture à échelle industrielle et visent que «les plus grandes coopératives agricoles françaises et internationales fassent elles-mêmes installer des petites fermes verticales sur leurs exploitations». Des fermes Jungle, il va s’en dire.

D’après la recherche britannique, les laitues cultivées dans des serres traditionnelles nécessitent environ 250 kilowatt-heure (kWh) d’énergie par an pour chaque mètre carré de surface, contre 3 500 kWh dans une ferme verticale.”

Calcul rapide: c’est donc 14 fois plus d’énergie. Pas banal quand même pour une forme d’agriculture que plusieurs tendent à voir automatiquement comme positive.

Ceci dit, comment équilibrer les différents aspects de tels projets, avec par exemple de l’énergie solaire? Si la ferme fonctionne à 100% avec ses propres panneaux alimentés «gratuitement pour toujours» (+ maintenance) par le soleil, est-ce que l’énergie est retirée de l’équation, ou est-ce que tout doit être connecté au réseau et la sobriété demeure importante même dans un cas ou toute l’électricité pourrait être purement locale? Complexe, comme nous le disions.

Image: Pablo Maillé pour Usbek & Rica.