Des arbres, de la collaboration, et la communauté, pour renforcer la résilience climatique urbaine à Kigali
Les solutions fondées sur la nature (SfN) sont indéniablement en plein essor. Comme elles ont déjà été présentées ici, elles constituent des moyens scalables et efficaces qui utilisent, protègent, gèrent durablement et restaurent les écosystèmes naturels ou modifiés afin de répondre aux crises – interdépendantes – climatiques et de biodiversité, tout en apportant des bénéfices importants pour le bien-être humain. Autrement dit, travailler « avec » la nature, « pour » la nature, mais pas seulement. Les SfN les plus efficaces ne se limitent pas à restaurer les écosystèmes naturels : elles renforcent le tissu social et économique local et reflètent les cultures et les voix des populations qu’elles visent à servir. Par exemple, les SfN offrent de nombreuses opportunités d’emploi aux populations vulnérables, même si les droits des travailleurs et l’inclusion dans les emplois liés aux SfN – comme dans la transition écologique en général- nécessitent des cadres politiques solides, des investissements dans le développement des compétences des travailleurs et un renforcement de la recherche. Aujourd’hui, plus de 60 millions de personnes dans le monde travaillent dans des activités liées aux SfN. Grâce à des investissements ciblés, l’emploi dans ce domaine pourrait augmenter à l’échelle mondiale, notamment en Afrique, en Amérique latine et dans les États arabes, où sa part pourrait passer d’environ 5 % actuellement à plus de 40 %.
En Afrique subsaharienne, les solutions fondées sur la nature gagnent du terrain : rien qu’au cours de la dernière décennie, le nombre de projets de solutions fondées sur la nature a augmenté en moyenne de 15 % par an, avec des initiatives qui fleurissent dans les villes, les forêts et les terres agricoles. Des efforts de reforestation à grande échelle aux petits projets communautaires, leurs formes peuvent varier, mais elles ont tendance à réussir lorsqu’elles sont ancrées dans les savoirs locaux, soutenues par les gouvernements et nourries par la collaboration internationale. Si les SfN tendent à se concentrer sur les défis environnementaux tels que l’atténuation du changement climatique, la perte de biodiversité et la dégradation des terres, il existe un potentiel inexploité pour davantage d’infrastructures « vertes-grises » intégrant à la fois les infrastructures bâties et celles fondées sur la nature. C’est dans cette direction que s’inscrit l’initiative SUNCASA (Scaling Urban Nature-Based Solutions for Climate Adaptation in Sub-Saharan Africa), un projet triennal financé par Affaires mondiales Canada et mis en œuvre par l’Institut international du développement durable (IIDD), le World Resources Institute (WRI) et des partenaires locaux à Dire Dawa (Éthiopie), Kigali (Rwanda) et Johannesburg (Afrique du Sud), au profit de 2,2 millions de personnes vivant dans des zones à haut risque d’inondation.
Dans le cadre de ce programme, la ville de Kigali met en œuvre un projet alliant science et action communautaire pour restaurer les micro-bassins versants de la rivière Nyabarongo – un effort ambitieux visant à réduire les inondations, les glissements de terrain et l’érosion des sols, devenus de plus en plus destructeurs ces dernières années. Grâce à une coalition menée par la ville et avec des partenaires locaux comme les Rwanda Young Water Professionals, l’Albertine Rift Conservation Society (ARCOS) et AVEGA Agahozo (une association de veuves du génocide), neuf sous-bassins versants critiques sont restaurés par le biais de boisement, de reboisement, d’agroforesterie et de végétalisation urbaine. Les résultats sont déjà visibles, et l’objectif est de planter plus de 2 millions d’arbres dans les districts de Gasabo, Nyarugenge et Kicukiro d’ici 2026. Des zones tampons stabilisent les berges et les ravins ; les coteaux dégradés sont reboisés ; et 125 000 arbres fruitiers diversifient les revenus des familles locales.
Mais au-delà des arbres, ce projet se distingue par son engagement en faveur de l’inclusion. Dans un pays où les hommes détiennent encore la majeure partie du pouvoir décisionnel, le projet rassemble femmes et hommes dans des ateliers pour réfléchir aux normes de genre et créer un espace de participation plus équitable. Les jeunes et les populations urbaines défavorisées sont également au centre des discussions, grâce à la création d’emplois, aux possibilités de formation et à une nouvelle campagne, «Igiti Cyanjye» (« Mon arbre »), qui mobilise les résidents pour prendre soin des espaces verts plantés lors des journées mensuelles de service communautaire Umuganda.
Crédit image : Kigali City