Cooperativa Integral Minga au Portugal, pour des territoires durables et résilients

Bien qu’elle puisse recevoir différentes appellations selon les pays (économie sociale, économie solidaire, économie communautaire, entrepreneuriat collectif), de manière générale la notion d’économie sociale et solidaire (ESS) regroupe un ensemble d’organisations dont les activités – notamment la provision de biens ou de services – reposent sur des principes communs d’utilité sociale, de gestion démocratique et participative, d’ancrage local et de rendement à la communauté (voir en ce sens par exemple la définition de l’ESS au Québec selon sa Loi sur l’économie sociale de 2013). Ces traits de service au bien commun placent les questions sociales et environnementales au-delà du profit, ce qui fait de l’ESS un cadre économique très pertinent pour la mise en place de la transition. Il est important de noter qu’une entreprise d’ESS cherche la viabilité économique, mais que celle-ci n’est pas son but ultime sinon un moyen pour assurer sa pérennité. À cela peut-on rajouter que certaines de ses formes juridiques sont multipartites. C’est-à-dire, elles permettent l’engagement et la participation à la gouvernance d’une organisation – ou même d’un projet, comme on le verra – des différentes parties prenantes, telles que des producteurs, consommateurs ou même des collectivités locales. Avec quelques variations selon chaque cadre légal particulier, c’est le cas de structures juridiques comme les coopératives de solidarité au Québec, les Sociétés coopératives d’intérêt collectif (SCIC) en France, les coopératives intégrales en Catalogne ou les coopératives sociales en Italie. Toutes elles permettent à différents types d’acteurs de participer activement à une initiative multi-activité, résultant ainsi un véhicule particulièrement adapté pour l’opérationnalisation d’un projet de développement de territoire basé sur la résilience et la durabilité socio écologique.

Dans la municipalité de Montemor-o-Novo, quelque 100 km à l’est de Lisbonne et avec un peu plus de 15000 habitants, la Cooperativa Integral Minga est un bon exemple de ce type de projet d’économie sociale et solidaire territoriale. D’après le cadre légal portugais, Minga est une coopérative multisectorielle, ce qui signifie qu’elle opère dans une variété de sphères sociales et économiques – ses branches sectorielles couvrent l’agroécologie, la production et la commercialisation de biens et services, ainsi que le logement et la construction durables. La coopérative cherche à promouvoir ainsi une économie de proximité et à accroître la résilience sociétale en facilitant l’utilisation des ressources disponibles localement, tant humaines que naturelles, pour développer des solutions communes à des besoins partagés. Cette approche se traduit par un renforcement de la relation entre producteurs et consommateurs au point que chaque membre de Minga est en fait un-e prosommateur-e: il/elle peut à la fois produire et consommer dans les différentes branches de la coopérative. Au sein des aires sectorielles de Minga, il est alors possible de produire et de consommer des biocosmétiques, des détergents, des produits agricoles locaux, ou des installations de panneaux solaires, pour ne donner que quelques exemples. La coopérative vise ainsi à faire face à la perte de population, au déclin du commerce local et à l’abandon de l’agriculture communs à de nombreuses municipalités rurales portugaises. L’ensemble s’inscrit dans une idée de « décroissance », appelant à sortir du cap de la croissance économique comme indicateur de prospérité et à considérer plutôt d’autres objectifs comme le bien-être collectif, le développement social ou l’équilibre de l’écosystème. En effet, Minga se rapporte au verbe portugais mingar/minguar qui signifie littéralement « décroître ».